Cabane-opéra

C’est une cabane pouvant accueillir des spectateurs et se poser dans différents territoires.

Ce que nous voulons, c'est sortir l'opéra de l'opéra, le sortir de sa maison, de ses grands établissements. Il ne s’agit en rien de remettre en question l'existence de ces lieux, et ce qui s'y fait, mais nous ne croyons pas qu’ils soient les seuls endroits où l'opéra, la musique et le théâtre mêlés puissent exister.

Oui, nous pouvons amener l'opéra dans des lieux dédiés au théâtre, comme nous l’avons déjà fait avec Didon et Enée de Purcell ou Orfeo de Monteverdi. Mais cette fois nous voudrions tenter autre chose. Créer une situation plus antinomique encore avec ce qu'est habituellement l'opéra. Rendre plus étroit encore le rapport entre les acteurs, chanteurs, musicien, et les spectateurs. Faire pénétrer les gens dans le son, ou les recouvrir de son, comme s'il s'agissait d'une matière, d'un tissu duquel on se vêt. Une enveloppe en somme. Ce que nous amenons avec nous, au-delà de cette structure, c'est "la meilleure acoustique du monde".

Quitter l'opéra c'est le donner à voir autrement mais aussi qu'il soit vu par d'autres, par des personnes qui ne rentreront jamais dans un opéra mais peut être plus facilement dans une cabane. Ce n'est pas un lieu intimidant ou froid, où l'on se dit que "ce qui s'y produit n'est pas pour moi".

Elle ne doit pas ressembler à un théâtre, cette cabane. C'est un lieu paradoxal, c'est à dire que nous sommes à l'intérieur de murs ou parois ou délimitations qui ne sont pas sûres d'elles-mêmes, semblent vaines. Un des paradoxes possibles pourrait être : comment entrer dehors ou sortir de l'extérieur. On peut imaginer que l'extérieur envahisse l'intérieur, qu'on puisse déshabiller le lieu, ou qu'on démantèle le théâtre avant la fin du spectacle. C'est un endroit dont la frontière, le seuil ne sont pas certains, qui parle de cette frontière et de ce seuil.

C’est un endroit dont on peut se demander la fonction. Un endroit que l'on pose sur une place, un champ ou une falaise, et dont on peut se demander à quoi cela sert d'y entrer, si ce n'est éventuellement s'abriter de la pluie. Sauf qu'en y entrant, on entend instantanément que c'est de son qu'il s'agit, on n'a pas tant l'impression d'avoir changé d'espace que ça, mais plutôt d’avoir été enveloppé, dans une sorte de cocon sonore.

Ce sera un espace modulable, et peut être même, si possible, jusqu'à son enveloppe. Le rapport des gens entre eux, avec l'aire de jeu, avec l'extérieur-même, sera modulable.

Ce n'est pas non plus une non-architecture. On peut le regarder, le contempler, ce bâtiment, et il compose le paysage dans lequel il se trouve, il le donne à voir différemment. Et lorsque l’on s'en va, lorsqu'on a tout rangé, on se dit qu'il manque quelque chose.